Cocorico

Le cinéma français a une botte secrète, le truc imparable qui remplit les salles, renfloue les producteurs et la cagnotte publique du CNC : la comédie. Deux ou trois fois par an, le phénomène se répète depuis des lustres, une comédie fait venir, ou revenir, les spectateurs en masse dans les cinémas. Comédie qui, bien sûr, sera ignorée par l’Académie des César et autre Festival de Cannes, Chamrousse étant le seul endroit accueillant pour les films comiques. Les fameux « milieux autorisés », moqués par Coluche, ne s’autorisent pas à aimer ce que le public aime, c’est une particularité bien française. Le spectateur qui paie sa place pour voir un film comique a juste envie de passer un bon moment et se fout royalement de l’avis de ce milieu autorisé.

Après Chasse gardée, gros carton du début d’année, voilà Cocorico qui déboule avec, encore, Didier Bourdon et un bonus de taille dans le registre de l’humour bleu-blanc-rouge : Christian Clavier, le roi de la mauvaise foi sur grand écran. Le duo promet beaucoup et en toute franchise je n’ai pas été déçu.

Cocorico compile, pour notre plus grand plaisir, les vannes des bonbons Carambar mixées avec celles de l’Almanach Vermot, le tout mélangé avec quelques traits d’esprit empruntés à Woody Allen ou Sacha Guitry. Les cibles principales étant les Allemands et les Portugais, les scénaristes ont évité les blagues sur les couleurs de peau ou les religions, en gros tous les sujets qui fâchent. Le procédé est plutôt malin car on rit de bon cœur, sans trop se prendre la tête, nos proches voisins sont habitués à l’humour vexatoire français et ne se formalisent plus pour quelques vacheries aussi lourdes qu’approximatives. On est presque dans la déconnade légèrement alcoolisée de fin de banquet mais pourquoi faire la fine bouche si tout le monde se marre ?

Côté cinéma, se moquer des Allemands est un sport national auquel nous nous livrons avec bonheur depuis La Grande Vadrouille en passant par La Septième compagnie ou Papy fait de la résistance. Nos cousins germains, restés quelque temps en résidence dans notre beau pays durant les années quarante, nous ont laissé du grain à moudre il est vrai. Nos amis portugais, sevrés de blagues sur leur pilosité et leur accent, ne font même plus attention à ce racisme tellement basique qu’ils en rigolent eux-mêmes.  

Porté par un casting aux petits oignons, Cocorico repose surtout sur le grand numéro de Christian Clavier. Le comédien marche dans les traces de Louis de Funes, immense comique issu d’une famille espagnole et non pas portugaise comme on l’entend souvent. Le « Gérard, vous êtes allemand ? » de Clavier ressemble comme deux gouttes de Schnaps au « Salomon, vous êtes juif ? » de notre de Funes national, personne ne s’en plaindra car le rire est au rendez-vous.

Autorisez-vous un moment de rigolade, pas de honte ou de culpabilité à avoir. Cocorico fait bien l’affaire.