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Le cri du projectionniste le soir au-dessus des gens

Le cri du projectionniste le soir au-dessus des gens

Quand tu descendras du ciel (2)

Publié par Le Projectionniste

Catégories : #A suivre ...

Quand tu descendras du ciel (2)

Bambi

 

Je n’enlève pas ma tenue de travail pour rentrer à la maison. Trop fatigué. Le dos en compote, les épaules en pâté de foie.

Dehors on se pèle le jonc. Le 25 décembre, à Paris, il fait toujours froid. Réchauffement climatique, mon œil, les météorologues sont tous des blaireaux. Heureusement que j’ai enfilé un pull sous la tunique rouge, ça m’évite d’être transformé en Findus. Par contre je me caille sévèrement le bas, j’ai les poils des jambes raides comme la justice, ils m’électrisent la couenne en se frottant contre le nylon du pantalon.

Saleté de costume, made in Taïwan, trop chaud sous les néons, trop froid sous les frimas, dès que les fêtes seront terminées je le filerai à un sans-abri. Toujours faire un geste pour les pauvres, c’est chrétien, l’amour du prochain, la main tendue, c’est important dans ce monde sans pitié. Si tous les clodos s’habillaient en Père Noël ça serait plus gai, la misère deviendrait un chouette spectacle. Et puis le rouge, les clodos, ils aiment bien.

Les poubelles sont en vrac dans la cour de l’immeuble. Les chats du quartier ont festoyé avec les restes du réveillon. Eux, au moins, ils ne se cassent pas la nénette pour trouver leur pitance. L’homme balance sa bouffe juste sous leurs moustaches et ils se servent. No prolémo. Avantage au règne animal. Je grimpe l’escalier en chantonnant le truc de Pow Wow. Moi vouloir être chat, me frotter dans tes bras.

Deuxième étage. Ma voisine du dessous a ouvert sa porte, signe qu’elle a quelque chose à me dire. J’entre dans le vestibule.

— Bambi, t’es là ?

Une voix enfantine me répond :

— J’arrive, je m’habille.

Elle déboule à moitié à poil, comme d’habitude. Je la reluque en me marrant.

— Ben dis donc, quand tu dis je m’habille c’est un euphémisme.

Elle écarquille ses yeux de biche.

— Qu’est-ce que tu racontes ? tu vois bien que c’est un peignoir.

Le bout de tissu en question, une chemisette transparente taille junior, est largement entrebâillé, comme sa porte de palier. Pas frileuse pour un sou, la Bambi. Elle vit dans les courants d’air et ne porte jamais de culotte ni de soutien-gorge. Son petit corps est en vitrine, laiteux, appétissant, il n’y a qu’à tendre la main pour cueillir le raisin et caresser la peluche bouclée qui décore le bas-ventre.

Bambi a un physique d’enfant avec des mensurations de top model, tout en minceur, en lignes gracieuses, mais surdimensionné au niveau des seins et du popotin.

Bambi, un magnifique repos du guerrier pour le travailleur fourbu qui se débat dans la grisaille du quotidien. Mon deuxième rayon de soleil de la journée, Bambi, après le gosse Kevin et son grand sourire.

Elle s’approche et me roule un patin de morte de faim, je sens le bout de sa langue titiller mes amygdales. Pendant que je reprends mon souffle, elle me dit en désignant le plafond :

— Ta bergère est avec son cousin. Ils ont fait un barouf de tous les diables.

— Ah bon ? Comment ça ?

Elle soupire :

— Mais putain, t’es con ou tu le fais exprès ?

Je secoue la tête comme un cancre qui gagne du temps avant de se choper un zéro.

— Explique, Bambi, je suis peut-être con, mais je ne comprends pas tes insinuations.

Elle hausse le ton, vexée.

— Ils ont défoncé le sommier, j’ai cru qu’ils passaient à travers le plancher. Le cousin, c’est un étau-limeur, un étalon de première, tout le voisinage était aux fenêtres tellement la Viviane gueulait de bonheur. Voilà, t’as compris ?

J’accuse le coup. Moi qui croyais que le cousin venait jouer au Scrabble. Ma femme, ma Viviane, se fait ramoner pendant que je bosse douze heures par jour. Je suis abasourdi, amorphe.

Bambi pose sa main sur ma joue et murmure :

— Excuse-moi mon biquet, je voulais pas te briser le cœur. Viens, je vais me faire pardonner.

Elle m’entraîne dans la chambre. Le balancement de son cul somptueux remonte un peu mon moral en berne. D’une légère secousse elle fait tomber sa chemise sur la moquette. Nue comme un genou, elle s’agenouille devant moi et baisse mon pantalon. Tout en me caressant elle me dit :

— Va falloir dégeler les grelots avant de mettre le petit Jésus dans la crèche.

Quand je suis à température ambiante, je me glisse dans le fourreau de sa bouche. La muqueuse à Bambi est un micro-ondes diablement efficace. Chaleur tournante. Une minute trente. Gling. La pire journée de ma vie se termine en apothéose. Un frisson me parcourt l’échine pendant que je vide ma hotte.

Elle me lance un regard Walt Disney, celui qui fait fondre les icebergs de six étages et pleurer l’ouvreuse du cinéma de quartier. Ses lèvres brillent, encore toutes humides du cadeau que je viens de lui faire. Elle déglutit lentement, comme si elle profitait au maximum d’un mets aussi précieux que nourrissant. Elle me sourit et murmure :

— Joyeux Noël.

 

A suivre ...

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