Dis-moi ce que tu aimes

L’enquête du magazine Marianne sur les notes Allociné est fort intéressante, même si, sur le fond, elle ne fait que confirmer ce que l’on sait déjà depuis longtemps : les critiques parues dans les différents médias et les avis du public ne sont pas toujours en phase, c’est le moins que l’on puisse dire.

La première explication me parait évidente. D’un côté nous avons des professionnels qui visionnent une montagne de films. Au fil du temps et des heures passées dans les salles obscures ces gens-là sont devenus exigeants. Cette exigence est le privilège de ceux qui ne paient pas leur place, c’est aussi leur passeport pour renouveler leur carte de presse ou leur place sur les plateaux de télé. Le film qu’ils vont passer au crible doit correspondre aux critères indispensables, pour eux, d’une œuvre dite de qualité. Tout ce qui reste dans leur tamis est durement critiqué ou carrément jeté aux orties. Chaque magazine spécialisé ou chaque journal ayant son style de critique bien particulier, une sorte de marque de fabrique destinée à contenter les abonnés, le journaliste en question va avoir un avis correspondant aux inclinaisons de sa rédaction. Logique. Dupieux sera un génie, Ridley Scott un tâcheron, tout dépend du journal pour lequel on travaille. De manière générale, et souvent unanime, les comédies françaises seront démolies sauf si elles sont réalisées par le duo Nakache-Tolédano. Cerise sur le gâteau, on apprend dans l’article de Marianne que certains films sont dézingués car il n’y a pas eu de projection à la presse avant leur sortie. Difficile de faire mieux en matière de mauvaise foi.

De l’autre côté nous avons le public, un assemblage pour le moins hétéroclite composé de cinéphiles, de gens qui vont au cinéma de temps en temps et de gens qui y vont rarement. Il s’avère donc très difficile de connaitre vraiment les goûts d’un public aussi varié où le « jeune », abonné aux plateformes de streaming, sevré de films et de séries, côtoie le plus « vieux » un peu débordé par ce déferlement d’images et de récits où il ne se reconnait plus.

Est-ce que le public lit les critiques ? Seules les personnes de la première catégorie, les mordus, lisent avec soin les critiques du film qu’ils vont voir, ceux de la deuxième catégorie jettent quelquefois un œil distrait sur la rubrique cinéma de leur hebdo préféré et réagissent aux bandes-annonces qui passent à la télé, ceux de la troisième catégorie s’en foutent royalement, les derniers films qu’ils ont vus étaient, par ordre chronologique : Titanic, Le Diner de cons, Bienvenue chez les Ch’tis et Les Tuche, quatre films en vingt-sept ans, quatre films qui ont fait exploser les compteurs soit dit en passant.

Pour ma part je n’ai pas de code de conduite ni d’avis préconçu. Je lis souvent les critiques Presse d’Allociné, quelquefois les avis du public, puis je m’empresse d’oublier ce que je viens de lire avant d’aller au cinéma. Le lendemain, en général, j’écris une chronique sur le film visionné, je donne un avis très personnel qui ne tient absolument pas compte, bien sûr, du nombre d’étoiles récoltées par ledit film.

Ne faisant partie d’aucun journal ou groupe de pression, j’écris ce que je veux. Ma liberté est de dire ce que je pense.